Lundi 6 mai 2024

La musique trad, on ne l’a pas toujours appelée comme ça. On a d’abord parlé du « folk », qui au départ désignait un courant de la musique populaire US. Et ce terme anglo-saxon a paradoxalement servi pour baptiser chez nous le renouveau de la musique traditionnelle, enracinée dans les cultures régionales. Porté par un élan  post-soixantehuitard, cet intérêt pour la tradition allait de pair avec la langue occitane, avec Gardarem lo Larzac, avec l’écologie des sabots et des robes à fleurs dans un parfum de patchouli. Je vous fais profiter ici et là d’un enregistrement en public du Perlimpinpin Folc qui date de mai 1979. Enregistré sur un magnétophone à cassettes, le son est pourri mais il restitue bien la force vocale et instrumentale de ce groupe légendaire.

Disons que l’objectif le plus réaliste de ce mouvement « folk » était que la musique et les danses traditionnelles ne se perdent pas. Et pour cet objectif au moins, le but a été atteint puisque cette musique, aujourd’hui appelée « trad » est encore bien vivante. Le festival « Trad Envie »  aura lieu du jeudi 8 au samedi 11 mai à Pavie dans le Gers,  sous le slogan « Aquò boléga deu Cap aus Pes », ce qui signifie « Cela bouge de la tête aux pieds ».

Dans le riche programme de ces quatre jours, j’ai relevé :

• Le 8 mai, Guillaume Lopez. Première création en solo, « buf e votz » (souffle et voix) laisse place à l’authenticité à la simplicité. Avec sa voix, sa collection d’instruments à vent (sax, flutes, fifres, graile cornemuse…), un sampleur et quelques accessoires disposés sur scène, Guillaume nous propose un répertoire constitué de ses compositions originales et du répertoire traditionnel des Pays d’oc. Guillaume Lopez est un musicien multi-projets, que l’on a pu voir en solo ou en collectif comme Le Bal Brotto-Lopez ou bien Anda-Lutz récemment au Taquin.

• Le 9 mai, le groupe Fülü. Les sept musicien.nes de la région de Toulouse mixent jazz londonien, techno et transe de carnaval empruntée à celui de Rio, dans un mélange d’italien, de français et de swahili. Voir ici ce qu’en dit Catherine Laugier sur le site « Nos Enchanteurs ».

• Le 10 mai, le groupe Imnari propose un concert/bal qui se situe au croisement des cultures par son répertoire et les sonorités fines de son instrumentarium : tablas indiens, cistre méditerranéen, guitare, nyckelharpa suédoise, violon, lyra crétoise, voix travaillée dans les traditions grecques et corses.

• Le 10 mai, le groupe Lo’ Jo de l’inoxydable Denis Péan. Après plus de 35 ans de carrière, Lo’Jo continue à offrir au monde une musique solaire, profonde et marquante, profondément ancrée dans des valeurs humanistes, précieuses à notre époque.

• Le 11 mai, le groupe Plume. Le groupe nous embarque dans un voyage envoûtant au rythme de l’archet furieux du erhu (violon traditionnel chinois) et des riffs indomptables de la guitare. En coulisse, les lames de fond déroulées par la guimbarde et les ponctuations énergétiques du didgeridoo s’accordent aux douces mélodies de l’accordéon.

• Le samedi 11 mai, grand bal avec KKC Orchestra & CPC. KKC Orchestra et le Collectif Passatges en Coserans présentent un nouveau projet de création et de collaboration artistique. Une rencontre entre hip-hop et musiques traditionnelles qui s’appuie sur des mélodies et des « riffs » du patrimoine musical pour construire une musique singulière, regardant le passé, projetant le futur mais profondément ancrée dans le présent. On notera que le KKC a tourné en 1994 un clip dans le sympathique village lotois de Montcuq, dans lequel certains d’entre vous pourront se repérer.

Au vu de ces textes de présentation, on constate que la musique trad se laisse aujourd’hui volontiers contaminer par des influences venues d’ailleurs, elle est très tolérante aux impuretés exotiques. Ce qui est finalement bon signe.

Vous n’êtes pas emballé par la musique trad ? Vous préférez le jazz, et de loin. Alors profitez de la chance d’avoir Le Taquin, avec quelques jolis rendez-vous dans le joli mois de mai :

• Les 11 et 15 mai, les artistes Julian Babou (Toulouse/Réunion) et Sonny Troupé (Guadeloupe) ont récemment voyagé de la Nouvelle Orléans à Puerto Rico, en passant par Miami, pour une résidence d’exploration. Ils reviennent en France pour deux concerts  accompagnés du trompettiste américain Etienne Charles.
• Le 16 mai, Un Pavé dans le Jazz invite Antoine Ferris [KAAARST] + HAŁVVA & Timothée QUOST. [Kaaarst] c’est une basse électrique aux sons rugueux, c’est du rock mais tout seul, des pédales d’effets qui font du bruit. Et un peu de pop qui arrive à se frayer un chemin. HAŁVVA est un duo qui a toujours cultivé son unité.
• Le 18 mai, JAM SESSION GROOVE, Gabriel Delmas invite Gaël Horellou. Pour la dixième fois Gabriel Delmas a le plaisir d’organiser la Jam Session Groove au Taquin. Gabriel continue ses collaborations prestigieuses en invitant un des saxophoniste français les plus talentueux: Gaël Horellou.
• Les 24 et 25 mai, HØST + MOWGLI, le groupe de Ferdinand Doumerc, Bastien Andrieu et du batteur Pierre Pollet, qui est fan de Robert Wyatt ce qui peut être suffisant pour se déplacer.
• Le 29 mai, No(w)Beauty, « Groupe français de l’année » (par Jazz Magazine et Jazz News).

No(w) Beauty

Comme souvent avec les amateurs de jazz, vous me dites que vous aimez le jazz bien sûr, mais pas celui-là … Essayez alors le festival Jazz en Comminges qui aura lieu à Saint Gaudens du 8 au 12 mai. Un festival peut être un peu trop grand public à mon goût, avec des noms comme Brad Mehldau, Roberto Fonseca, Kyle Eastwood …

Vous n’aimez toujours pas ? Alors il ne me reste plus qu’à vous proposer un concert de reggae. Tout le monde aime le reggae. Le mercredi 8 mai, le Bikini invite deux groupes légendaires, The Congos (formé dans la deuxième moitié des années 70) et The Gladiators (formé en 67). Il y a peut-être des jeunes qui pensent que le reggae est une musique traditionnelle. Comme on disait au Conservatoire Occitan de l’époque : « la tradition est un progrès qui a réussi. »